un peu d'économie 9,3%: un hold_up colossal

9,3% : un Hold-up colossal

Rendez-nous nos 150 milliards


François RUFFIN CHEZ Daniel MERMET

Il n’y a pas d’argent dans les caisses annonce notre président.

D‘un autre côté, en vingt ans, la part des salaires dans le PIB en France a baissé de 9,3% ; Cette donnée majeure est quasiment effacée du débat public, les médias n’en parlent pas et pourtant tout repose la-dessus : ça devrait être le recourt et la référence permanente en ce qui concerne le pouvoir d’achat, les retraites, la sécurité sociale, les régimes spéciaux etc. : tout devrait normalement se référer à ce transfert de 9,3%.


C’est comme s’il fallait avoir en permanence de la croissance, produire davantage de richesses, sans jamais se poser la question fondamentale : A QUI VONT CES RICHESSES ET COMMENT LES RÉPARTIR.Et pourtant, depuis le début des années 80 il y a un glissement des richesses prises au salariat, en faveur du capital. Si aujourd’hui, on a l’audace d’aborder ce sujet, on est un gauchiste archaïque : il ne faut donc surtout pas dire que la salariat touche moins de PIB que c’était le cas, il y a 25 ans.


Pourtant aujourd’hui, ceux qui osent le dire sont des institutions comme la Banque des règlements internationaux (BRI) (avec Jean-Claude Trichet pour la BCE, le représentant de la Fed etc). L’été 2007 ces gens ont rendu un document qui n’a pas fait la « Une » des journaux où ils reconnaissent qu’il y a un très haut niveau de la part du profit, qu’il y a une marge d’une importance sans précédent, qu’il y a une poussée à la hausse de la part des profits depuis le milieu des années 80 et une poussée à la baisse de la part des salaires. On voit bien ici le constat qu’au niveau mondial, il y a de plus en plus d’argent qui va au capital et de moins en moins d’argent qui va aux salariés.


Conséquences de ce glissement : même Alan Greenspan est inquiet et déclare que la répartition aujourd’hui est tellement injuste qu’il a peur que les salariés finissent par renverser le capitalisme.


Chiffrage du transfert : Que veut dire exactement que, en France, 9,3% des richesses sont passées du travail vers le capital ? En 1982, par exemple, il y avait 66% de la valeur ajoutée du pays qui partait en salaire. Aujourd’hui, on est passé entre 56 et 57%.


Que représente ces 10 points du PIB ? Le PIB de la France aujourd’hui c’est 1800 milliards d’euros ; c’est donc près de 180 milliards d’euros qui, chaque année, au lieu d’aller au salariat vont au capital, au profit des actionnaires.

On nous parle sans cesse du trou abyssal de la sécu, soit autour de 12 milliards d’euros, du déficit des régimes de retraite, soit 5 milliards d’euros. A côté donc, ce transfert des richesses est considérable et il pourrait combler à lui tout seul 10 fois les besoins.


Comment cela c’est produit : on nous répète journellement que tous les mouvements de grève n’ont rien de commun entre eux, n’ont aucun réel dénominateur commun et restent très corporatifs.

C’est démagogique et populiste de parler des 9,3%

Pourtant, il y a un dénominateur commun ; et ce dénominateur commun, c’est ce chiffre de 9,3%. C’est à dire que ces 9,3% condensent, en un seul chiffre toute une évolution de l’économie française depuis 20 ans. Si les actionnaires étaient venus piquer directement l’argent dans les poches des salariés, ceux-ci se seraient révoltés, auraient appelé la police et Sarkozy serait intervenu. Cela c’est donc passé de manière plus douce :

1 - par des suppressions de poste d’abord dans le privé puis dans le public y compris dans les sociétés faisant d’énormes bénéfices ; donc réduction de la part des salaires dans la valeur de la part ajoutée puisque ces gens se retrouvent au chômage ou au RMI


2 - la peur du chômage a entraîné la stagnation des salaires depuis 25 ans, si l’on prend en compte le travail partiel.


3 - augmentation de la flexibilité (mot patronal) de la précarité (mot syndical). Depuis 1980 la proportion des travailleurs à temps partiel est passé de 6 à 18% et les autres emplois atypiques (intermittence, intérim)de 17 à 31% ; donc triplement d’emploi à temps partiel ou intermittent. C’est la naissance de l’emploi jetable.


4 - attaque (aujourd’hui) du salaire indirect : sécurité sociale, retraite etc.. donc cotiser plus longtemps pour toucher moins à la retraite, franchise médicale, non remboursement de certains médicaments. C’est le dernier biais, dans la mesure ou on ne peut plus faire baisser le salaire direct qui stagne déjà depuis 25 ans.


Il y a une occultation complète aujourd’hui à la fois par les médias et par le gouvernement de la répartition des richesses et de la valeur ajoutée. Le président préfère dire qu’il va falloir travailler plus, faire de la croissance.


A la « une » des Échos on nous annonce que le pouvoir d’achat stagne, et deux pages plus loin on apprend que les yachts sont de plus en plus luxueux, qu’il y a 3 ans d’attente pour pouvoir en acheter un, que la mondialisation fait de plus en plus de multimillionnaires …. Mais établir aujourd’hui ce lien entre un pouvoir d’achat qui stagne pour la majorité de la population, les emplois précaires etc et les riches qui sont de plus en plus riches, oser tisser ce lien entre les deux extrémités de l’échelle sociale : c’est démagogique, c’est populiste, c’est mal venu, c’est Indéscent (surtout pour J.M. Sylvestre, A. Chabaud ou PPDA, mais pas seulement pour eux).


On comprend que Sarkozy qui dîne au Fouquet’s avec l’ensemble du CAC 40 ne soit pas d’accord pour que ces 9,3% repartent au salariat, mais le plus grave et le plus inquiétant c’est que la gauche gouvernementale n’en dise rien non plus. Pour le PS, le courage aujourd’hui c’est de dire qu’il ne faut pas lutter contre les réformes que propose le gouvernement, le courage consiste à venir dire sur France Inter Manuel Valls, c’est de reconnaître que ces réformes sont aujourd’hui absolument nécessaires. Le combat du PS ce n’est plus une logique de combat, ce n’est plus une logique de dénonciation de ce mur d’argent et de confrontation à ce mur de l’argent mais c’est au contraire une logique de résignation.


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Conclusion : « Le comble de la dépossession, c’est d’être aussi dépossédé de la capacité de réfléchir à la dépossession dont on est victime et de ne pas pouvoir prendre conscience qu’il est possible de se battre pour mettre fin à cette dépossession. » (Alain Accardo)

qui pour remettre un peu d'espoir après ça ?

Surement pas notre président